Un an après son coéquipier Matthew Goss, Simon Gerrans a levé les bras au terme des 298 km de la Primavera. Il avait fallu attendre la 102e édition pour voir un coureur non-européen s’imposer. On en a maintenant deux. Du même pays, s’il vous plaît. 

Image

Un chinois dans l’échappée, pour l’histoire

Jamais un chinois n’avait pris le départ de la Classissima. Jamais un chinois n’avait, par conséquent, attaqué pour prendre l’échappée du jour. Ji Cheng, 24 ans et coureur de 1t4i depuis 2007, à l’époque où elle s’appelait encore Skil Shimano, a fait les deux en même temps. Les huit autres coureurs de l’échappée représentaient bien des nationalités, dont certaines parmi les plus atypiques du peloton. Outre les deux italiens (Pagani, De Negri) et l’espagnol (Oroz), on retrouve un moldave (Berdos), un kazakhe (Gruzdev), un colombien (Suarez), un norvégien (Laengen) et un danois (Morkov). Les neuf compteront jusqu’à 12 minutes de marge. Mais ils seront repris à 60 km de l’arrivée, après plus de 200 km ensemble. Chapeau quand même !

Qui pouvait battre Cavendish ?

A peu près tout le monde. Si les BMC de Gilbert n’avaient pas roulé dans le Manie, le britannique aurait encore tenu. Immense favori de ce Milan-San Remo, le coureur de l’Ile de Man a encore perdu la Primavera, encore une fois à cause de son grand ennemi: La montagne. Pas de côtes gigantesques, on ne dépassera par ailleurs jamais 600 m d’altitude sur ce Mialn-San Remo, mais c’était trop pour le britannique. Au bout de 5 heures de course, il lâche prise. Pour la première fois. Une heure plus tard, Cavendish le dit à ses équipiers: C’est fini. Il ne reviendra pas. Il ne reviendra jamais sur le peloton, divisé petit à petit, au fil des kilomètres et des montées.

Quintero au sol: De terribles images reviennent en mémoire

Aux alentours de 15 heures 30, Carlos Quintero, de Columbia Coldeportes, chute lourdement. Il a tapé dans un mur, et ne se relève pas. On a peur pour lui, on repense à Wouter Weylandt, décédé sur le Giro en 2011, à Mauricio Soler, qui a failli subir le même sort que le belge la même année, sur le Tour de Suisse cette fois…Mais, heureusement, le compatriote de Soler ne sera pas aussi gravement accidenté. Malgré la présence d’ambulanciers à ses côtés et son départ sur civière, il n’a presque rien. Enfin, « presque » rien, par rapport à ce qu’il aurait pu subir. Le colombien de 26 ans (depuis deux semaines) s’en tire tout de même avec une commotion cérébrale et une fracture du coude.

Cancellara trop fort. Oui mais…

Depuis 2010, on le sait, il est presque impossible de prendre des relais lorsque Cancellara roule. Simon Gerrans et Vincenzo Nibali. L’italien, qui a lancé l’offensive victorieuse dans le Poggio, et l’australien, qui l’a suivi, ne prendront aucune fois la tête jusqu’à l’arrivée dans San Remo. De toute façon, ils ne pouvaient pas. Ils ne pouvaient d’ailleurs rien faire d’autre qu’attendre. Et n’avaient pas forcément envie. Pour Nibali, c’était d’ailleurs une certitude, son coéquipier Peter Sagan, seulement 21 ans, étant le plus rapide du groupe de poursuivants. Mais, malgré l’effort intense et continu de l’ensemble des équipiers de Oscar Freire, déjà vainqueur en 2004, 2007 et 2010, les trois hommes que sont Cancellara, Nibali et Gerrans sont allés au bout. Et, logiquement, c’est Gerrans qui s’est imposé. Nibali, limité au sprint, et Cancellara, après dix kilomètres à rouler seul, n’ont rien pu faire.

Image

L’Australie sur le toit du monde

Un an après Matthew Goss, c’est son coéquipier Simon Gerrans qui remporte cette 103e édition de la prestigieuse course italienne. Une édition qui semblait au départ partir vers un sprint massif à l’issue d’une course assez ennuyante, puisque Cavendish voulait cette victoire avec le maillot arc-en-ciel sur le dos. Mais il en a été autrement. Entre le grand favori britannique lâché dès la mi-course, le champion belge Philippe Gilbert qui a chuté alors qu’il semblait en mesure de jouer la gagner, et des attaques tranchantes et décisives dans la Cipressa et le Poggio, on a eu droit à une très belle édition. Les deux australiens de Green Edge Matthew Goss et Simon Gerrans sont à ce jour les seuls non-européens à avoir remporté la Primavera. Avec Cadel Evans, ils participent activement, par leurs brillants résultats, à la popularisation du cyclisme aux antipodes. L’an dernier, ils avaient terminé troisièmes du classement par nations. Cette année, ils sont bien partis pour faire mieux. Qui vivra verra…

Finalement, c’est la meilleure tactique qui s’est imposée

Si Simon Gerrans a remporté la Primavera, devenant au passage grâce à elle l’un des meilleurs coureurs australiens de l’histoire, c’est surtout grâce à sa science de la course qui a fait merveille ce samedi. Parti dans la roue de Nibali à une dizaine de kilomètres de la ligne, il ne s’est jamais alarmé, n’a pas roulé quand il a vu le peloton revenir comme une bombe sur les trois hommes de tête. Il n’a pas pris de relais, à part un de quelques secondes à a la flamme rouge. Ensuite, il a lancé son sprint pour devancer sur la ligne Fabian Cancellara, vainqueur en 2008, et qui signe là sa deuxième deuxième place de suite, trop usé pour faire le sprint. Derrière, les Liquigas ont échoué. Avec 3 coureurs dans le top 10, ils n’ont pourtant pas réussi ce qu’ils voulaient: Gagner. Nibali (3e), Sagan (4e) et Oss (9e) n’oseront pas dire le contraire. Ce qui est sûr, c’est que le meilleur tacticien a gagné à San Remo.

 

Milan – San Remo : L’Italie au sommet