Simon Gerrans

Comme chaque année, le World Tour s’ouvrait aux antipodes, dans ce pays paumé et aride nommé l’Australie. Si on prétend que les koalas ont plus d’intelligence que les habitants de ce grand et immonde pays, il sera cependant difficile d’affirmer qu’ils roulent plus vite à vélo. Ainsi, les coureurs australiens ont dominé de la tête et des épaules leur Tour national, qui occupe une place grandissante dans leur coeur. Contrairement au reste du peloton qui, dans sa grande majorité, n’en a pas grand chose à faire.

Orica-GreenEDGE avait aligné une équipe digne des Grands Tours pour sa course de reprise. Un fait rare. Il faut dire que la formation australienne, qui entre dans sa troisième année, possède probablement des objectifs énormes sur le Tour Down Under, quand les autres équipes du World Tour sont là pour accumuler des kilomètres. Cependant, cette année, de nombreux autres coureurs australiens avaient misé sur cette course sur leurs terres pour se refaire une réputation ou pour bien commencer la saison.

Les aussies ont donc dominé la lutte pour le général de la tête et des épaules, et ce dès la première journée. En remportant l’étape d’ouverture, Simon Gerrans confirmait d’entrée ses objectifs au général. Troisième de l’étape, Steele Von Hoff se plaçait en bonne surprise. Neuvième du jour alors qu’on l’attendait plutôt en vacances, Cadel Evans se montrait déjà à un niveau auquel on ne l’avait plus vu depuis longtemps. Quand, dès le premier jour, les australiens brillent, c’est bon signe. Très bon signe. Un succès, c’était déjà autant pour l’Australie et Orica-GreenEDGE qu’en 2012 et 2013, leurs deux seules participations jusque là. Mais la formation australienne n’ira pas plus haut. La faute à … d’autres australiens.

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En effet, en 2014 encore, Orica n’aura pas fait mieux qu’une victoire. Et ça n’aura pas été faute d’essayer. Au cours des cinq premières étapes, Gerrans trustera les cinq premières places des étapes. Deuxième le lendemain de son succès, puis cinquième, quatrième et enfin troisième. Une régularité à toute épreuve qui aura fait de Gerrans l’homme le plus en vue de l’épreuve australienne, devant Diego Ulissi et ses quatre places parmi les quatre premiers.

Pourtant, le double-vainqueur de l’épreuve avant cette édition 2014 ne gagnera donc plus. Deux fois, sur ses quatre places parmi les cinq premiers, il sera battu par un non-australien. Les deux autres fois, vous l’aurez compris si vous n’êtes pas stupide et si vous lisez bien, c’est un compatriote qui l’aura devancé pour la victoire. Ainsi, l’arrivée à Campbelltown qui met fin à la troisième étape voit Cadel Evans l’emporter. Déjà bien en vue lors de la première journée, le coureur BMC avait confirmé le lendemain avec une troisième place. Cette fois-ci, il fait mouche en se montrant plus fort que les Porte, Gerrans et Ulissi, pour empocher sa première victoire depuis le Tour d’Alberta, en septembre. Sa première en World Tour depuis le Critérium du Dauphiné 2012.

Surtout, cette victoire, la deuxième d’un australien, installe deux locaux aux deux premières places du général, le vainqueur du Tour 2011 devançant Gerrans de 12 secondes. Aucun autre aussie ne viendra s’installer sur le podium. Mais la victoire de Richie Porte, lors de la cinquième journée de course, la dernière pouvant changer quelque chose au général, fait définitivement des coureurs vert et or les maîtres de leurs terres. Ulissi, troisième, est encerclé. Par Gerrans et Evans, premier et deuxième, bien sûr, d’un côté. Par Richie Porte et Nathan Haas, quatrième et cinquième, de l’autre.

Le classement général ne changera plus. A l’arrivée à Adelaïde, les australiens sont donc quatre dans les cinq premiers. Un autre, Adam Hansen, est neuvième. Il remporte également le maillot de meilleur grimpeur. Gerrans triomphe au classement par points. Jack Haig, d’UniSA, est le meilleur jeune. William Clarke remporte pour Drapac le trophée du plus compétitif. Orica-GreenEDGE est la meilleure équipe. Une razzia à une échelle rare pour les australiens. Au long de ces six jours, le cyclisme des Antipodes a été à la fête. Car, outre ces trois victoires d’étapes, ces quatre hommes dans le top 5 au général et un tir parfait pour les maillots distinctifs, ce pays a signé en six jours neuf podiums sur 18 possibles, et 23 top 10. Jamais une étape ne s’est faite sans un australien dans le top 5. Une seule fois, aucun représentant de ce pays n’était sur le podium de l’étape. Mais Gerrans était troisième.

Tout au long des six jours qu’a duré la course, l’Australie a eu de nombreuses raisons de faire la fête. Jamais ils n’ont douté de leurs chances au général, jamais ils n’ont pu penser finir sans victoire, jamais les australiens n’ont été inquiétés dans leur quête de maillots distinctifs. Le sans-faute, c’est ce qu’a réalisé ce pays émergent du cyclisme mondial à l’occasion de cette course. Chez eux, les aussies ont brillé, rappelant que, si beaucoup d’équipes viennent en touristes, eux ont mieux à faire que de regarder les kilomètres passer. Et cette année plus qu’une autre, cette chose, ils l’ont non seulement faite, mais ils l’ont très bien faite.

Article écrit par Kena

L’Australie à la fête