Justin Jules, reprise de justice
En précédant Samuel Dumoulin sur la ligne d’arrivée du Grand Prix d’Ouverture La Marseillaise, tracée boulevard Michelet devant un Stade Vélodrome en travaux, Justin Jules, vingt-six ans, a empoché, après un succès d’étape au Tour du Hainan 2011, sa deuxième victoire professionnelle. Certes, mais pourquoi en parler ici ? Eh bien, parce si cette victoire dans la première épreuve française de la saison, aussi méritoire fut-elle, n’aurait en temps normal attiré qu’un simple intérêt poli pour la chose avant que d’autres courses et préoccupations n’en chassent le souvenir, le parcours pour le moins atypique et tourmenté de son lauréat mérite que l’on y prête un peu plus d’attention.

Justin Jules, malgré ce nom handicapant de collégien tête à claques à méchouille, est le fils de l’ex-pro Pascal Jules, qui fut le coéquipier talentueux (deux victoires d’étape sur le Tour) et l’alter ego facétieux de Laurent Fignon, avec qui il a débuté le cyclisme à l’US Créteil. Pascal Jules mourut dans un tragique accident de voiture le 25 octobre 1987, à vingt-six balais, alors même qu’il s’apprêtait à faire son retour dans la « bande à Guimard » dont il avait été exclu un temps, le directeur sportif nantais ayant été déçu par ce potentiel immense gâché par un dilettantisme insouciant. A la mort tragiquement prématurée de son père, le petit Justin n’était ici-bas que depuis treize mois.

Un autre drame familial, peut-être plus traumatisant encore, va dégringoler sur Justin Jules. Voici cinq ans, en janvier 2008, la Cour d’assises du Val d’Oise, sise à Pontoise, le condamne à cinq années de taule, dont trois ferme. Ce qui lui est reproché ? D’avoir, trois ans auparavant, alors qu’il était à peine majeur, assassiné son beau-père René Caufield à coups de manche de pelle et de barre de fer dans la caboche, sur le perron du pavillon familial de Boisemont. Le contexte familial tumultueux (en grande partie à cause de l’alcoolisme virulent de ce beau-père qui distribuait volontiers les coups et les insultes), l’absence manifeste de préméditation incitent la cour à requalifier les faits de « meurtre » en « coups mortels », une nuance importantissime ; défendant la thèse du meurtre, l’avocate générale requerrait une peine bien plus conséquente, douze ans de réclusion criminelle. Heureusement pour Justin Jules, le verdict fut en définitive plus clément ; dans le même temps, son frère Sébastien, lui aussi poursuivi (pour le délit de « non-empêchement de crime »), est acquitté.

Bénéficiant d’une remise de peine, Justin Jules s’attelle à reprendre une vie normale ; cela passe, aussi, par le sport. Il roule pour le compte de la formation Vendée U, l’antichambre de l’équipe Bouygues Télécom (devenue depuis Europcar). En 2011, il rallie les rangs de La Pomme Marseille, qui bat alors, pour des bisbilles administratives, pavillon … letton ! A la fin de la saison, ayant débloqué le compteur de victoires et montré de belles choses (5e du Tour du Finistère, juste derrière Thomas Voeckler), il rejoint une troisième structure en trois ans, celle de Véranda Rideau-Super U. Mais, victime d’une mononucléose et subissant la disparition de l’équipe, il retourne à La Pomme Marseille pour cette saison 2013, où il ne manque pas sa cible : première course, première victoire !

Avis à la concurrence, ce mec est un tueur !

 
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Ceci n’est pas une arrivée : c’est un nouveau départ …

 

Justin Jules, reprise de justice
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