Massa, destin trop souvent brisé

Pilote talentueux, discret et sérieux, Felipe Massa aurait mérité une plus belle carrière. Mais la chance n'a jamais souri à un homme dont les plus belles années de pilote sont passées.
Chez Ferrari, les débuts de l’aventure
En 2006, Felipe Massa est recruté par Ferrari pour remplacer son compatriote Rubens Barrichello, parti chez Honda après six saisons au sein de l’écurie au cheval cabré. Pourtant, ses débuts en Formule 1 étaient loin de le préparer à cela. Au bout d’une seule saison chez Sauber, en 2002, il s’était déjà retrouvé éclipsé, l’écurie suisse jugeant son pilotage trop agressif, trop fougueux. Il signe comme pilote essayeur chez Ferrari, qui permettra son retour au sein de Sauber en forçant la main à l’écurie qu’elle motorise.
Cet intérêt montré par l’écurie italienne, alors imbattable au championnat, est le signe d’une envie de faire de Massa leur futur pilote titulaire. Fin 2005, quand Barrichello décide de quitter la Scuderia, il est tout logiquement désigné comme futur équipier de Schumacher. Le passage est peut-être brutal, puisqu’il se retrouve au sein de la meilleure écurie de l’histoire, aux côtés du pilote le plus titré de la Formule 1.
D’ailleurs, il ne parviendra jamais à se battre à armes égales avec Schumacher, accusant un net déficit de vitesse. Mais il réalise une bonne fin de saison, remportant son premier Grand Prix, en Turquie, puis terminant la saison sur un nouveau succès, capital pour lui, au Brésil. Troisième du Championnat du Monde, il a tenu la pression d’une première saison chez Ferrari et n’a pas été ridicule face à Schumacher. Mais il est tout de même loin du Kaiser (81 points contre 120, 2 victoires à 7), et n’est pas assuré de conserver sa place. C’est seulement la retraite de Schumacher qui lui permet de rester dans le second baquet, Raikkönen s’emparant du premier. C’est la première fois, et peut-être la seule, que la chance a tourné du côté du Brésilien.
2008 : Tout près, trop près du titre
Quatrième du championnat 2007 avec 3 succès, Massa termine à 16 points de son champion du Monde de coéquipier. Mais la saison se termine sur un goût amer. Leader du Grand Prix du Brésil, il est sommé de laisser la tête au Finlandais au 50e des 71 tours, lui offrant ainsi la victoire et le titre. Devant son public, Massa monte donc sur le podium en vaincu, mais en vainqueur moral d’une course qui aurait dû lui revenir.
En 2008, il aura l’occasion pour la première fois de sa carrière d’être leader d’équipe. Après deux abandons pour commencer, il récupère son retard avec 6 top 5 consécutifs, dont 5 podiums et 3 victoires, à Barhein, en Turquie et en France. Mais il va ensuite subir trois abandons en sept courses et, malgré des victoires au Grand Prix d’Europe et en Belgique, attaque les trois dernières courses de l’année avec sept points de retard sur Lewis Hamilton, Britannique de 23 ans. Statu quo au départ du Grand Prix du Brésil, puisque le pilote McLaren a remporté le Grand Prix de Chine et repris deux points sur Massa, deuxième. Ces deux points que le Brésilien avait récupérés au Japon.
La tâche du pilote Ferrari semble impossible à accomplir. Mais il va prendre le départ de son Grand Prix préféré, devant une foule toute acquise à sa cause. Après les qualifications, l’espoir subsiste. Massa partira de la pole, Hamilton quatrième. Le Brésilien n’aura aucun problème à remporter la course, alors qu’Hamilton perd du terrain et se fait doubler, à quelques tours de l’arrivée, par Vettel. Passant sixième, le Britannique n’est virtuellement plus champion du Monde : il terminerait avec 97 points, autant que Massa, mais perdrait au nombre de victoires sur la saison (6 pour le Brésilien, 5 pour le Britannique). Quand Massa passe la ligne, Hamilton est encore sixième et semble avoir perdu le titre. Le pilote Ferrari exulte au volant de sa monoplace. Son père, dans les stands de la Scuderia, également. Mais les larmes de joie vont se transformer en larmes de tristesse. Dans le dernier virage, Timo Glock a vu ses pneus rendre l’âme. Il termine six secondes derrière le Britannique qui, pour un petit point, est titré champion du Monde. En garant sa voiture à la place du vainqueur, Massa explose en larmes. Il saura rester digne sur le podium, mais sa chance, sa vraie chance, sa seule chance de devenir champion du Monde est passée.
Hongrie 2009 : Le drame
La Ferrari version 2009 est mal-née. Elle n’est pas au niveau des précédentes, qui ont permis à Massa et Raikkonen de lutter pour les titres. Mais elle retrouve enfin de la vitesse au bout de cinq Grands Prix, et Raikkonen signe le premier podium rouge de l’année à Monaco. Quelques semaines plus tard, en Allemagne, c’est au tour du Brésilien d’y parvenir. Parti seulement huitième, à 2 secondes 3 dixièmes du poleman, Mark Webber, il double les Brawn-Mercedes en course et termine troisième, à 15 secondes de l’Australien.
La Ferrari F60 semble enfin au niveau des meilleures monoplaces, et Massa a l’espoir de remporter enfin une course en 2009. En Hongrie, il signe le huitième temps de la première puis de la deuxième partie de la séance de qualifications. Mais, dans cette deuxième séance, il va subir un brutal et cruel coup d’arrêt. Un coup du sort, même. Un ressort, détaché de la Brawn de Barrichello, vient percuter de plein fouet son casque. Un Brésilien chez Ferrari percuté par la pièce de la monoplace d’un ex-pilote Ferrari brésilien. Massa rentre à près de 200 km/h dans les murs de pneus au bout de la ligne droite. Évacué inconscient du circuit, il est envoyé à l’hôpital, et son pronostic vital est engagé.
Il s’en remettra, mais va rater le reste de la saison 2009. Quand il revient en 2010, Ferrari a fait appel au meilleur pilote du marché, Fernando Alonso, pour retrouver les sommets. Et le constat s’affiche comme une évidence : Massa n’est plus aussi rapide. Peur de subir à nouveau un accident qui pourrait lui coûter la vie ? Plus aussi réactif qu’avant ? Les propositions sont nombreuses pour expliquer sa baisse de vitesse. Mais aucune ne rendra au vice-champion du Monde 2008 ses capacités.
Depuis son retour, il n’est plus que l’ombre de lui-même. Cinq podiums en 2010, certes, mais seulement trois depuis. Et aucun top 5 au classement général du Mondial. Dimanche 24 novembre, une page s’est tournée. Massa a vécu son dernier Grand Prix avec Ferrari, après huit ans et 140 courses au volant d’une monoplace rouge. Au Brésil, comme un symbole. L’histoire aurait pu être belle. Mais elle ne le sera pas. Massa a quitté la Scuderia presque anonymement et, dans l’histoire des pilotes Ferrari, n’a pas laissé une trace indélébile. Une trace qu’il aurait imprimée à jamais si les pneus de Timo Glock n’avaient pas lâché, il y a cinq ans.
En 2006, Felipe Massa est recruté par Ferrari pour remplacer son compatriote Rubens Barrichello, parti chez Honda après six saisons au sein de l’écurie au cheval cabré. Pourtant, ses débuts en Formule 1 étaient loin de le préparer à cela. Au bout d’une seule saison chez Sauber, en 2002, il s’était déjà retrouvé éclipsé, l’écurie suisse jugeant son pilotage trop agressif, trop fougueux. Il signe comme pilote essayeur chez Ferrari, qui permettra son retour au sein de Sauber en forçant la main à l’écurie qu’elle motorise.
Cet intérêt montré par l’écurie italienne, alors imbattable au championnat, est le signe d’une envie de faire de Massa leur futur pilote titulaire. Fin 2005, quand Barrichello décide de quitter la Scuderia, il est tout logiquement désigné comme futur équipier de Schumacher. Le passage est peut-être brutal, puisqu’il se retrouve au sein de la meilleure écurie de l’histoire, aux côtés du pilote le plus titré de la Formule 1.
D’ailleurs, il ne parviendra jamais à se battre à armes égales avec Schumacher, accusant un net déficit de vitesse. Mais il réalise une bonne fin de saison, remportant son premier Grand Prix, en Turquie, puis terminant la saison sur un nouveau succès, capital pour lui, au Brésil. Troisième du Championnat du Monde, il a tenu la pression d’une première saison chez Ferrari et n’a pas été ridicule face à Schumacher. Mais il est tout de même loin du Kaiser (81 points contre 120, 2 victoires à 7), et n’est pas assuré de conserver sa place. C’est seulement la retraite de Schumacher qui lui permet de rester dans le second baquet, Raikkönen s’emparant du premier. C’est la première fois, et peut-être la seule, que la chance a tourné du côté du Brésilien.
2008 : Tout près, trop près du titre
Quatrième du championnat 2007 avec 3 succès, Massa termine à 16 points de son champion du Monde de coéquipier. Mais la saison se termine sur un goût amer. Leader du Grand Prix du Brésil, il est sommé de laisser la tête au Finlandais au 50e des 71 tours, lui offrant ainsi la victoire et le titre. Devant son public, Massa monte donc sur le podium en vaincu, mais en vainqueur moral d’une course qui aurait dû lui revenir.
En 2008, il aura l’occasion pour la première fois de sa carrière d’être leader d’équipe. Après deux abandons pour commencer, il récupère son retard avec 6 top 5 consécutifs, dont 5 podiums et 3 victoires, à Barhein, en Turquie et en France. Mais il va ensuite subir trois abandons en sept courses et, malgré des victoires au Grand Prix d’Europe et en Belgique, attaque les trois dernières courses de l’année avec sept points de retard sur Lewis Hamilton, Britannique de 23 ans. Statu quo au départ du Grand Prix du Brésil, puisque le pilote McLaren a remporté le Grand Prix de Chine et repris deux points sur Massa, deuxième. Ces deux points que le Brésilien avait récupérés au Japon.
La tâche du pilote Ferrari semble impossible à accomplir. Mais il va prendre le départ de son Grand Prix préféré, devant une foule toute acquise à sa cause. Après les qualifications, l’espoir subsiste. Massa partira de la pole, Hamilton quatrième. Le Brésilien n’aura aucun problème à remporter la course, alors qu’Hamilton perd du terrain et se fait doubler, à quelques tours de l’arrivée, par Vettel. Passant sixième, le Britannique n’est virtuellement plus champion du Monde : il terminerait avec 97 points, autant que Massa, mais perdrait au nombre de victoires sur la saison (6 pour le Brésilien, 5 pour le Britannique). Quand Massa passe la ligne, Hamilton est encore sixième et semble avoir perdu le titre. Le pilote Ferrari exulte au volant de sa monoplace. Son père, dans les stands de la Scuderia, également. Mais les larmes de joie vont se transformer en larmes de tristesse. Dans le dernier virage, Timo Glock a vu ses pneus rendre l’âme. Il termine six secondes derrière le Britannique qui, pour un petit point, est titré champion du Monde. En garant sa voiture à la place du vainqueur, Massa explose en larmes. Il saura rester digne sur le podium, mais sa chance, sa vraie chance, sa seule chance de devenir champion du Monde est passée.
Hongrie 2009 : Le drame
La Ferrari version 2009 est mal-née. Elle n’est pas au niveau des précédentes, qui ont permis à Massa et Raikkonen de lutter pour les titres. Mais elle retrouve enfin de la vitesse au bout de cinq Grands Prix, et Raikkonen signe le premier podium rouge de l’année à Monaco. Quelques semaines plus tard, en Allemagne, c’est au tour du Brésilien d’y parvenir. Parti seulement huitième, à 2 secondes 3 dixièmes du poleman, Mark Webber, il double les Brawn-Mercedes en course et termine troisième, à 15 secondes de l’Australien.
La Ferrari F60 semble enfin au niveau des meilleures monoplaces, et Massa a l’espoir de remporter enfin une course en 2009. En Hongrie, il signe le huitième temps de la première puis de la deuxième partie de la séance de qualifications. Mais, dans cette deuxième séance, il va subir un brutal et cruel coup d’arrêt. Un coup du sort, même. Un ressort, détaché de la Brawn de Barrichello, vient percuter de plein fouet son casque. Un Brésilien chez Ferrari percuté par la pièce de la monoplace d’un ex-pilote Ferrari brésilien. Massa rentre à près de 200 km/h dans les murs de pneus au bout de la ligne droite. Évacué inconscient du circuit, il est envoyé à l’hôpital, et son pronostic vital est engagé.
Il s’en remettra, mais va rater le reste de la saison 2009. Quand il revient en 2010, Ferrari a fait appel au meilleur pilote du marché, Fernando Alonso, pour retrouver les sommets. Et le constat s’affiche comme une évidence : Massa n’est plus aussi rapide. Peur de subir à nouveau un accident qui pourrait lui coûter la vie ? Plus aussi réactif qu’avant ? Les propositions sont nombreuses pour expliquer sa baisse de vitesse. Mais aucune ne rendra au vice-champion du Monde 2008 ses capacités.
Depuis son retour, il n’est plus que l’ombre de lui-même. Cinq podiums en 2010, certes, mais seulement trois depuis. Et aucun top 5 au classement général du Mondial. Dimanche 24 novembre, une page s’est tournée. Massa a vécu son dernier Grand Prix avec Ferrari, après huit ans et 140 courses au volant d’une monoplace rouge. Au Brésil, comme un symbole. L’histoire aurait pu être belle. Mais elle ne le sera pas. Massa a quitté la Scuderia presque anonymement et, dans l’histoire des pilotes Ferrari, n’a pas laissé une trace indélébile. Une trace qu’il aurait imprimée à jamais si les pneus de Timo Glock n’avaient pas lâché, il y a cinq ans.