Tour de France 2011
Carte du Tour

Cette deuxième partie du résumé de la saison ne concerne qu’une course, mais quelle course ! Le Tour de France, l’épreuve qui fait rêver les coureurs du monde entier, qu’ils soient sprinteurs ou grimpeurs, puncheurs ou rouleurs. Cette 98ème édition se tenait du 2 au 24 juillet entre Noirmoutier et Paris, sur vingt-et-une étapes.

Mais les surprises allaient commencer avant, lors de la présentation des équipes. Alors que 21 équipes sont déjà montées sur l’estrade pour procéder à la traditionnelle présentation, les neuf derniers coureurs arrivent au centre de l’arène du Puy-du-Fou. Les coureurs de SaxoBank, guidés par Contador, montent tout sourire sur l’estrade. Mais la bonne humeur ambiante va se briser quand le présentateur va mettre en avant le champion espagnol. Sifflé par tout le public présent, Contador se décompose, seconde après seconde, pour sembler finalement être le plus déçu des hommes. Le soir-même, la presse internationale ne tarit pas de critiques pour cet acte du public du Tour. Alors qu’il avait déjà une mauvaise réputation, cet acte n’est pas pour lui servir. L’image du Tour est bêtement ternie, mais tout le monde veut montrer que cette course est bien la plus belle du monde.

Lors du départ du Passage de Goix, le lendemain, Perrig Quemeneur est le premier attaquant de cette édition du Tour. Cette première étape était réservée à Philippe Gilbert, il n’aura pas raté l’occasion. Cette victoire est la première de sa carrière sur le Tour, et elle lui permet d’endosser les maillots jaune, vert et à pois, un bilan qui serait exceptionnel pour la majorité des coureurs. Pourtant, Gilbert en veut plus. Après deux étapes qui ont consacré Garmin, un contre-la-montre par équipes remporté par une petite marge et une étape de plaine voyant Tyler Farrar s’imposer et faire un signe magnifique à son défunt ami Wouter Weylandt, Gilbert revenait lors de la quatrième étape avec beaucoup d’espoirs. Mûr-de-Bretagne devait être le premier rendez-vous entre les favoris, après bien sûr le contre-la-montre par équipes.

Mais ce dernier avait déçu, et les spectateurs comme les coureurs voulaient enfin voir les Contador, Schleck et Evans s’affronter. La pente est longue, plus de deux kilomètres, mais les pourcentages ne sont pas aussi difficiles que dans le Mur de Huy, survolé en avril par Gilbert. Pourtant, celui-ci est mis favori par tout le monde. A tort. Cette quatrième étape aura confirmé que Gilbert n’est pas encore prêt pour suivre les meilleurs sur une telle distance. Il n’a pas tenu à la première attaque de Contador, dès le début de la montée, et aura dû tenir sur toute la longueur de l’ascension. Il voit impuissant la victoire de son ancien coéquipier Evans, qui coiffe Contador sur le poteau, alors que celui-ci a levé les bras sur la ligne. C’était là la dernière occasion pour Gilbert de s’illustrer selon les observateurs. Les trois étapes qui suivaient étaient des étapes de plaine. Qui dit Plaine dit Sprint, et qui dit Sprint dit Cavendish. Manix Man n’aura pas déçu sur ces trois jours. Deux victoires pour lui, et une deuxième place pour son coéquipier Matthew Goss, qu’il était censé emmener. Mais, incapable de tenir la dernière montée, Cavendish s’est rangé sur le côté pour laisser Tony Martin et Mark Renshaw aider Goss. Si Cavendish avait été là, le vainqueur de Milan-San Remo aurait peut-être pu remporter une première étape sur le Tour. Mais le natif de Douglas n’a pas pu, et a préféré se préserver pour la quête du maillot vert, son grand objectif. Edvald Boasson Hagen, lui, a parfaitement profité de cette étape à l’arrivée difficile pour remporter, à 24 ans, un premier succès sur un Grand Tour.

Cette huitième étape était la première véritable à donner une vraie occasion de s’illustrer aux grimpeurs. Hushovd, en jaune depuis six jours, s’attendait alors à perdre son maillot jaune. Dès le sixième kilomètres, une échappée de dix coureurs se forme. Parmi eux, on peut noter la présence de Riblon, Gautier, Van Garderen et Rui Costa. Alors que ces quatre hommes ont lâché le reste du groupe de tête dans l’ascension de la Croix Saint-Robert, le vétéran d’Astana, Alexandre Vinokourov, tente sa chance. Il ne veut qu’une chose: S’emparer du maillot jaune, rêve qu’il n’a encore jamais atteint malgré son palmarès impressionnant. Alors qu’il est pratiquement revenu sur l’échappée, Rui Costa en remet une couche et s’envole vers la victoire. Le kazakhe, ainsi que le reste de l’échappée, seront repris par un Gilbert au-dessus du lot. Evans prend la troisième place de l’étape, mais Hushovd, héroïque, conserve son bien pour une seconde. Cette première étape difficile n’aura pas vraiment créé d’écarts, mais elle a montré que Cadel Evans est en forme, au contraire de Contador et des frères Schleck, qui ont eu du mal.

La neuvième étape a vu, pour la deuxième journée de suite, une échappée aller au bout. Mais ce n’est pas le vainqueur qui marquera cette étape. Deux faits ont été bien plus importants. La victoire de Luis Leon Sanchez a certes été un grand moment dans la carrière de ce coureur, mais elle a été entachée par une affaire dont le cyclisme se passerait bien. Deux mois après les décès de Wouter Weylandt et Xavier Tondo, un mois après la grave chute de Juan Mauricio Soler, Johnny Hoogerland et Juan Antonio Flecha ont été percutés par une voiture officielle, qui, voulant éviter un arbre sur le bord de la route, n’a malheureusement pas pu passer à côté de ces deux coureurs. Leurs blessures sont très graves car, en plus du choc, ils sont rentrés dans des barbelés sur le bord de la route. La voiture, elle ne s’est pas arrêtée. Pour toute punition, elle est expulsée du Tour pour cette édition. Hoogerland et Flecha qui, « grâce » à cette chute, remportent le prix de Combatifs du Jour, menaceront de porter plainte. mais cette affaire restera sans suite.  A cent kilomètres de l’arrivée, une autre chute avait eu lieu, dans le peloton cette fois. Elle obligera quatre coureurs à abandonner, dont les deux favoris Jurgen Van Den Broeck et Alexandre Vinokourov. Ce dernier souffre d’une fracture de la clavicule, et sa carrière semble donc, à 38 ans, terminée. Au passage, Thomas Voeckler s’emparait alors du maillot jaune, c’est l’autre fait marquant de cette étape. Mais ce n’est rien par rapport aux accidents qui venaient de se dérouler…

Hoogerland, le courageux du Tour
Hoogerland, le courageux du Tour

Après la journée de repos, qui a vu le contrôle positif de Kolobnev, les coureurs repartaient pour deux étapes de plaine avant de trouver la montagne. Encore une fois, Cavendish montre de très belles choses, en prenant une deuxième place avant de s’imposer. Mais il ne pourra qu’être déçu de sa défaite contre Greipel à Carmaux. Les deux hommes, anciennement ennemis jurés chez HTC, s’affrontaient sur le Tour pour la première fois de leur carrière. Même si Cavendish en est à trois victoires d’étapes après la onzième journée de course, il retiendra amèrement cette lourde défaite.

La haute montagne arrivait avec la douzième étape et l’arrivée à Luz Ardiden. Mais, comme prévu et comme on pouvait s’y attendre fortement, les grands favoris n’ont rien tenté. Deux hommes ont attaqué dans l’ascension finale. Samuel Sanchez Et la surprise Jelle Vanendert, qu’on n’avait jamais vu à pareille fête. Les deux hommes iront au bout ensemble, mais seulement dix secondes devant Frank Schleck, qui a attaqué à 400 mètres de l’arrivée pour reprendre vingt secondes aux autres favoris. Cette étape montre autre chose: Alberto Contador, qui termine à 43 secondes du vainqueur, n’est vraiment pas en forme, et Thomas Voeckler a été exceptionnel. En compagnie de son coéquipier Pierre Roland, il ne perd que cinquante secondes sur Samuel Sanchez, et conserve son maillot jaune.

La treizième étape, elle, n’avait à première vue rien d’exceptionnel. Elle se terminait à Lourdes, après une ascnesion compliquée du Col d’Aubisque, mais trop loin de l’arrivée pour voir les favoris se dévoiler. L’échappée est d’ailleurs allée au bout, en morceaux. Thor Hushovd a attaqué en montagne, fait rare, mais a ensuite lâché prise sur Jérémy Roy, déjà présent dans un grand nombre d’échappées jusque là. Mais, dans la descente, Hoshovd a profité de l’aide du colabo (c’est ce qui ressortira après cette étape) Moncoutié, pour remporter cette victoire. Pas de miracle donc pour Jérémy Roy, qui ne prend que la troisième place du jour, mais se replace au classement du maillot à pois, dont il est le nouveau leader.

L’arrivée au Plateau de Beille était attendue et redoutée des favoris. A chaque fois que cette montée à servi d’arrivée, le vainqueur de l’étape a ensuite remporté le Tour. Cette édition fera exception, puisque les favoris ont encore une fois décidé de laisser partir deux coureurs, encore une fois Sanchez et Vanendert. Cette fois-ci, la victoire est revenue au belge, qui s’est emparé du maillot à pois par la même occasion, alors que le statut quo est resté entre les favoris. Ah non, pas exactement, Andy Schleck a repris deux secondes à tout le monde…

Victoire de Cavendish
Victoire de Cavendish lors de la 15e étape

La quinzième étape était une étape de plaine. Encore une fois, à ce jeu-là, c’est Cavendish qui est sorti vainqueur, juste devant Tyler Farrar et un revenant, Alessandro Petacchi. Le britannique, qui a également remporté le sprint intermédiaire du peloton, compte alors plus de 35 points d’avance sur Rojas au maillot vert , qui semble ne plus avoir de grandes chances de s’en emparer, à part si Cav’ termine hors délais sur l’une des étapes de montagne qui arrivent.

Lors des seizième et dix-septième étapes, le profil était à peu près similaire. Sur ces deux étapes, le drapeau norvégien a été levé fièrement par les deux seuls coureurs de ce pays présents dans le peloton. Thor Hushovd et Edvald Boasson Hagen ont chacun remporté une étape, et ce dernier a même fini deuxième de celle remportée par son compatriote. Chez les favoris, Contador a animé la course, mais n’a repris que quelques petites secondes aux Schleck et à Voeckler, bien peu lorsque l’on sait ce qui les attend.

Cette dix-huitième étape a dépassé l’entendement. Personne n’aurait pu penser à un tel dénouement. Dans al montée du Col d’Izoard, Andy Schleck se décale, pour n’avoir personne devant lui. Il a le champ libre. Il se dresse sur ses pédales, attaque, et part. Pour la première fois depuis le début du Tour, il ne regarde pas derrière pour voir son frère. Il s’envole vers la victoire. Pendant trois heures, les fans de cyclisme, devant leur télévision, sur le bord de la route ou en écoutant la radio, redécouvrent le cyclisme de Merckx et Hinault. Les échappées olitaires de plus de cent kilomètres, les épopées incroyables, tout cela est revenu sous les pédales d’Andy Schleck. On croyait alors qu’il s’envolait vers la victoire. Mais, grâce à un travail exceptionnel de Cadel Evans dans l’ascension du Galibier, Voeckler conservait le maillot jaune pour quinze petites secondes. Contador et Sanchez, eux, après deux jours où ils auront été omniprésents, ont perdu le Tour. Ils finissent lâchés, à plus de deux minutes du groupe maillot jaune. Le grupetto, lui, arrivé hors-délais pour deux minutes, est repêché. Cavendish est sauvé, même s’il perd vingt points sur Rojas et Gilbert.

Le lendemain, sur la route de l’Alpe d’Huez, dernière montée du Tour, Alberto Contador attaque. Il reste alors presque cent kilomètres à parcourir, mais tous les favoris le suivent. Cadel Evans, lui, a un problème mécanique qui l’empêche de continuer. Ceci l’a peut-être sauvé. Voeckler craque dans la montée, et Contador et Schleck sont les deux seuls favoris à tenir en tête. L’espagnol et le luxembourgeois impriment un rythme élevé, mais sont rattrapés au pied de l’Alpe d’Huez. Comme s’il ne s’était rien passé, Contador retente sa chance dès les premiers hectomètres de cette ascension mythique. Mais il sera repris, après avoir passé seul en tête vingt des vingt-et-un virages de l’Alpe. Rolland et Sanchez sont revenus sur le tenant du titre, qui craque. Sanchez, qui a roulé toute la montée devant le français, lâche à son tour. Pierre Rolland peut exulter. C’est le seul français à s’imposer sur ce Tour, et il le fait au sommet de l’un des monuments du Tour de France. Il s’empare du maillot blanc alors que Sanchez s’assure le maillot à pois. Voeckler, lui, à cause de sa montée solitaire du Galibier, a craqué et compte à présent plus de deux minutes de retard sur Andy Schleck, le nouveau maillot jaune. Dans le grupetto, Mark Cavendish et José Joaquin Rojas passent la ligne ensemble. Il seront une nouvelle fois repêchés, et le britannique conserve un maillot vert qui lui est à présent pratiquement assuré.

Schleck s'impose au bout de l'enfer

Il ne reste que 41 kilomètres avant de connaître le vainqueur du Tour de France 2011. Ils sont trois en moins d’une minute, mais Frank Schleck, qui n’a que quatre secondes d’avance sur Evans, a très peu de chances de s’imposer. Le duel entre Andy Schleck et ce dernier, très attendu, n’aura pas eu lieu. Evans est presque aussi rapide que Tony Martin, il prend la deuxième place du contre-la-montre, à seulement sept secondes du futur champion du monde. Andy Schleck, malgré une très bonne place, dans le top 20, en termine avec plus d’une minute trente de retard au classement général sur l’australien. Le duel n’a pas eu lieu.

La traditionnelle arrivée sur les Champs n’a pas créé de surprises, elle. Le champagne a coulé à flots, le sprint final a eu lieu malgré une échappée, et Mark Cavendish a encore gagné. Evans est donc le premier australien à remporter le Tour de France, et le premier non-européen et non-américain. Thomas Voeckler, quatrième, est la surprise du Tour, alors que les frères Schleck prennent les deuxième et troisième places juste derrière Evans. Rolland, maillot blanc, Cavendish, maillot vert, et Sanchez, maillot à pois, auront eux aussi l’occasion de monter sur le podium final, tout comme Jérémy Roy, super-combatif du jour. Cette édition du Tour, pleine de surprises, a malgré tout confirmé que Cadel Evans est dans une grande saison, et a également consacré Mark Cavendish, enfin, alors que cela faisait quatre ans qu’il tournait autour du maillot vert.

 

Bilan de la saison (Partie 2 sur 3)